Je devrais dire, « mon médecin de famille prend sa retraite ». Mais après plus de 30 ans de « vie commune », je le considère vraiment comme un ami. Je m’attendais à sa retraite, mais cela reste quand même un événement important.
Nonobstant le fait qu’il me faudra attendre que le système de santé me trouve un nouveau médecin, je perds la richesse d’avoir un médecin qui détient mon historique de santé depuis plus de 30 ans. On minimise souvent l’importance de ce suivi. Pour l’hypertension, le diabète de type 2, entre autres, cet historique est irremplaçable.
Revenons-en plutôt à Jean-Pierre, un médecin exceptionnel. Quand ta pharmacienne te dit « Vous êtes chanceux d’être suivi par le docteur Jean-Pierre… », tu réalises ta chance. En fait, je ne l’ai pas choisi, il avait hérité de mon dossier en reprenant la clientèle d’un médecin qui partait à la retraite.
Chaque fois qu’il ouvrait la porte de son bureau à un ou une patient(e), il le faisait avec un grand sourire engageant et un bon mot. Comme si chacun de ses patients étaient un ami personnel. Une fois dans son bureau, il commençait toujours par s’enquérir de notre vie. Souvent, il se rappelait d’une conversation de notre précédente visite et y faisait allusion.
Jean-Pierre savait vous expliquer la nature de votre maladie et le pourquoi du traitement proposé. Un sacré pédagogue, toujours capable de trouver la comparaison ou la métaphore qui nous permet de mieux comprendre. Je me souviens encore de ses explications sur le foie qui ramasse du glucose au cas où on en manquerait dans la nuit.
Jean-Pierre a été honoré par le magazine Le Médecin de famille canadien. On le décrit comme un chanceux. Jean-Pierre est fils de médecin, il est resté attaché à la nature qu’il a connu enfant à Sept-Îles. Le printemps et l’automne, il prend des vacances de pêche ou de trappe (sa façon de chasser). Il fut greffé du rein en 1999 suite à une maladie découverte dans son enfance. La chance ou je devrais dire l’amour lui a donné l’un des reins de son épouse. Il en était fier. Il m’a souvent dit, à la blague, quand je me plaignais de prendre trop de pilules, « quand tu en prendras autant que moi, on en reparlera ». Ce qui me clouait le bec pour un bon moment!
Mais le plus important, et il protesterait que non, c’est qu’il m’a probablement sauvé la vie … en me faisant perdre un rein. Je vous raconte. Lors d’une visite de routine, je lui dis qu’il me semble avoir un léger creux à droite de mon abdomen. Il me tâte consciencieusement puis décide que mon foie est difficile à localiser ce jour-là Du coup, il me dit, on va te faire passer une échographie pour voir s’il y a quelque chose. Je vous rappelle que je n’avais aucune douleur, juste un petit creux à peine perceptible. Quand les résultats sont arrivés à son bureau, il me téléphone. Je suis surpris et demande ce qu’ils ont trouvé à mon foie. Oublie le foie, me dit-il. On a trouvé une masse suspecte sur ton rein gauche. Une grosse masse… Bien sûr la masse était une tumeur cancéreuse. Avec son humour habituel, il me dit, je pourrais te suivre pour l’ablation de la tumeur, mais ce n’est pas ma spécialité même si j’en ai un qui vient d’ailleurs. De plus, ajoute-t-il c’est bientôt le moment de mon voyage de pêche ce qui te retardait pour les soins. Il me confie alors au soin d’un urologue. On m’a fait l’ablation du rein pour se débarrasser de la tumeur et… je suis encore bien en vie. Voilà pourquoi je dis que je lui dois la vie. Sans cette échographie, je serais probablement mort de cette tumeur.
Je termine en souhaitant à Jean-Pierre une retraite heureuse, remplie et surtout en santé.
Quand Dominic Champagne a proposé aux Québécois de signer le Pacte pour la transition, ma compagne et moi avons vite décidé de le signer. D’un commun accord, nous avons convenu que cette signature ne resterait pas un voeu pieux et qu’il fallait que cela mène à des changements dans notre vie.
Cet engagement n’était pas innocent car nous avions déjà l’intention dans un avenir pas trop lointain de changer nos deux voitures pour une seule, mais électrique. De plus, les canicules répétées nous orientaient vers l’achat d’une thermopompe. Bref, nous étions prêts pour le Pacte.
La thermopompe fut notre premier geste concret. Pour profiter des subventions offertes par le gouvernement, il fallait faire effectuer une analyse de notre efficacité énergétique. De fil en aiguille, nous avons changé 2 fenêtres, amélioré l’isolation dans le sous-sol et changé le chauffage à l’huile pour un chauffage électrique et une thermopompe. Désormais, il n’y a plus de produits pétroliers dans le chauffage de notre petite maison.
À la signature du Pacte, nous avions deux voitures à essence: l’une qui était payée et l’autre qui était louée. Un an et demi plus tard, nous n’en avons plus qu’une seule et elle est électrique.
Voilà les deux grosses dépenses pour nous conformer à notre signature.
L’achat local nous interpellait déjà. Nous avons essayé de nous approvisionner davantage localement pour la nourriture, certes mais pour bien d’autres choses. Dans ce domaine, il nous reste bien des progrès à accomplir. Comme bien des gens, le prix est encore un obstacle à la vertu. Avec le temps, on va augmenter la proportion du local dans nos achats.
Une transition est encore très difficile à faire pour nous, celle qui consiste à manger moins de viande et en particulier le boeuf. Certes on fait des efforts mais soyons honnêtes, nous sommes encore largement carnivores. Comme quoi personne n’est parfait.
Conclusion, bien des gens espèrent que l’après-pandémie soit plus verte que l’avant. Plutôt que d’attendre les autres, pourquoi ne pas faire vous-mêmes votre propre plan de transition vers une économie plus verte.
« J’ai voulu m’entretenir avec toi, mais, malin, tu t’es caché dans la Lumière. Alors, dans mon « ici et maintenant » Sans essayer de résister. j’ai pu savourer, entre émerveillement et naîveté, un bref tête à tête avec toi. Toi, le Mystère de la Vie. »
Jordan Ray
De cette réflexion ma pensée Est vers toi allée .… Louis, Des plus bouleversée, De te savoir seul dans l’anxiété. Impossible pour toi de savoir, De calculer ou de voir, Comme ça, mine de rien, Pourquoi entre les va et vient Tout ce bruit dans le couloir … Le temps, pour moi, s’est arrêté,figé… La crainte m’a rattrapée Mon coeur s’est emballé J’ai tellement peur Que nous ne soyons à l’heure … Que je puisse te rassuré Et te parler coeur à coeur Au moins une autre fois Te redire quelle profonde joie Ta si précieuse présence a été pour moi. Tu rejoindras ta belle Madeleine Comme tu disais d’une telle sincérité Qui me donnait de voir ton immense honnêteté Et ainsi d ‘encore plus t’apprécier et t’aimer Ce qui atténuera mon immense peine … Je continuerai de TE redire « JE T’AIME »
Suzanne Duchesneau, novembre 2020
Lettre à mon père
Cher papa je cherche encore les mots pour te dire la profonde tristesse que j’éprouve depuis ton départ. Après l’incident de Matane où tu nous avais donné toute une frousse, je savais que tout pouvait arriver et que tu pourrais bien nous fausser un jour compagnie sans nous donner un très long préavis. Le temps a passé et j’avais fini par croire que, peut-être tu saurais déjouer la mort pour au moins encore quelques années.
Je me souviens qu’enfant, quand tu venais travailler dans ma chambre le soir, je sentais ta présence rassurante. Loin de me tenir éveillé, je m’étais habitué à tes coups de crayon sur le papier sans savoir alors que tu dessinais les futurs bâtiments agricoles de fermes en devenir.
Quelques années plus tard, lorsque tu m’amenais avec toi pour aller arpenter la terre de pépère Jérôme ou encore pour marcher dans la forêt à l’automne à la recherche de perdrix, c’était toujours avec joie que j’embarquais avec toi dans la voiture pour partir à l’aventure, car s’en était toujours une pour moi.
Puis grandissant, je commençai à t’accompagner sur les pistes d’atterrissage, souvent au club de vol à voile Champlain et quelquefois à l’aéroport de Bellefeuille près de St-Jérôme.. Tu m’as alors fait découvrir non seulement le plaisir de voler parmi les nuages, mais aussi tes amitiés avec les gens qui partageaient ta passion.
À l’adolescence, je découvris ta grande curiosité. Elle se manifestait tant à l’égard des choses de l’esprit qu’envers notre entourage et la famille élargie des Cotte et des Diamond sans oublier tous ceux que tu as rencontrés sur ton passage. À travers toi, j’ai pris goût à la découverte intellectuelle et je constate aujourd’hui que j’ai hérité un peu de ton amour de la famille. C’est une richesse pour le cœur et pour ça je t’en suis infiniment reconnaissant.
Évidemment, tout au long des années qui m’ont conduit à de l’adolescence à l’âge adulte on a bien sûr vécu quelque périodes creuses. Malgré mes frasques et nos désaccords, tu t’es toujours montré d’une loyauté sans faille et jamais tu ne m’as privé de ton affection, cette affection qui m’était si chère.
Avec les années je me suis quelque peu assagi, enfin, un petit peu, et je suis devenu père à mon tour. Deux filles, amoureuses de la vie, curieuses, drôles, intelligentes, sociables et généreuses tout comme toi, et aussi un peu espiègles à leurs heures, tout comme …. moi.
Papa tu as su garder un cœur d’enfant tout au long de ta vie, ce qui t’a rendu si attachant. S’y mêlait un peu de l’éternel adolescent toujours prêt à relever les défis les plus inattendus. Tu as parfois peut-être péché par orgueil, mais comme le disait Yvon Deschamps, ce n’était un défaut, mais plutôt une qualité extrême. Mais plus que tout, je garderai de toi le sens du devoir et de l’honnêteté qui font le cœur de l’homme que je suis aujourd’hui. Sans oublier le respect des autres et la défense de nos droits.
Malgré la vieillesse qui faisait tranquillement son œuvre, les dernières années à tes côtés auront été mémorables. Un voyage père-fils le long du majestueux fleuve St-Laurent, mais aussi, et surtout la réussite d’un rapprochement plus intime avec toi. Je dois dire aussi que l’arrivée de Suzanne dans ta vie a contribué non seulement à ton bonheur, mais aussi au mien. Elle nous aura appris à nous dire je t’aime ce qui est probablement le plus beau cadeau qu’un fils puisse à la fois donner et recevoir.
Ses années-ci, après avoir passé un peu de bon temps en ta compagnie, lorsque je me retrouvais seul sur le chemin du retour, je ne pouvais m’empêcher de m’émouvoir de la chance que j’avais de pouvoir profiter de ces petits moments de bonheur, sachant que la vie allait un jour nous séparer.
Papa, tu auras été un compagnon de voyage formidable. Ta simplicité et ton goût de la découverte étaient remarquables. Tu auras toujours une place dans mon cœur et dans mes rêves.
Papa, je n’ai jamais aimé les cérémonies d’adieu, aussi, je te dis à bientôt et je t’embrasse.
Après 95 ans de loyaux services, oncle Louis, le jeune frère de papa, nous a quittés pour un monde meilleur, dit-on. C’était pour nous, mon frère et moi, un « mon oncle » dans tous les sens du mot. Avant qu’oncle Louis ne soit lui-même un papa, il aimait se « pratiquer » avec ses neveux. Papa lui-même concourait à donner une stature spéciale à Louis. Il aimait nous raconter les « frasques de jeunesse » de son frère. On préférait souvent les histoires sur Louis aux contes de grand-maman.
Il serait trop long de se remémorer dans le détail les « Histoire de papa sur Louis ». Quelques titres : l’appropriation des belles planches de grand-papa, la nuit sous la tente dans la cour, le traîneau perdu attaché à une auto, et bien d’autres.
Je n’ai pas de souvenirs visuels du fameux cheval de Louis sur lequel, il me semble, il livrait le courrier. Je me souviens qu’il en parlait souvent et que des adultes y faisaient aussi allusion. Le connaissant, il devait se croire un cowboy sur son cheval. Il avait l’imagination fertile notre oncle Louis.
Quelques semaines avant Noël, nos pièces de Meccano disparaissaient mystérieusement. Avec la complicité de papa, Louis les empruntait. Il s’amusait à construire des machines dans lesquelles il incorporait un moteur ou un autre gadget qui devenaient nos cadeaux de Noël.
Notre première expérience de camping et notre premier exercice de tir à la carabine sur des billots flottants sur la rivière Rouge furent aussi faits avec oncle Louis.
Que dire aussi des après-midis à transplanter des pins sur la terre de Louis (achetée de Mémère Jérôme). Ces arbres, plantés près d’un ruisseau avaient pour but de freiner l’érosion de la berge un peu abrupte. Des dizaines d’années plus tard, Louis nous a montré ces beaux arbres, fruits de notre labeur.
Ces séances de foresterie étaient l’occasion pour Louis de nous faire rêver avec lui de tout ce qu’il comptait faire sur cette terre. Terrain d’aviation, grange et pacages pour les chevaux et bien d’autres aménagements. Nous avons aussi participé à la construction du fameux voilier de Louis. Voilier dont la carrière fut très brève avant de couler au lac Nominingue. Notre dur labeur consistait à ramasser les copeaux par terre et surtout à écouter religieusement le récit de tout ce qu’oncle Louis allait faire avec ce voilier.
Foresterie et ébénisterie était toujours suivi d’un repos bien mérité au Restaurant Forget ou au Restaurant Racicot. Au menu, une Grapette bien fraîche, le travail ça donne soif. Finalement, oncle Louis s’est installé à Montréal. Nos contacts furent plus rares. Il est devenu papa à son tour et je présume que ses deux enfants auraient bien des histoires à raconter eux aussi.
Malgré tout, il a réussi à m’inculquer des leçons sur la vie en métropole. C’est grâce à lui que j’ai compris pourquoi on ajoutait est ou ouest après le nom de certaines rues. J’ai aussi appris à regarder les numéros de porte pour savoir si j’étais loin du fleuve ou de la rue Saint-Laurent.
Il me servait aussi de havre certaines fins de semaines où je me sentais un peu seul dans le grand Montréal. Tante Madeleine avec ses sourires en coin m’aidait à deviner si oncle Louis exagérait beaucoup ou un peu. Elle devint un peu la complice de nos conversations.
Enfin, un séjour à l’Annonciation l’été contenait presque toujours une conversation avec oncle Louis sur la galerie et une baignade dans le lac Nominingue tout près.
C’est dire la grande place que « mon oncle Louis » avait dans nos vies.
NOTE : Les cousines et les cousins sont invités à y ajouter des événements sous forme de commentaires. Qui sait si on ne pourra pas ensuite en faire un texte consolidé.
Lors du soixantième anniversaire du Garage des Laurentides (le garage Cotte), Frédéric Cotte, alors propriétaire de l’édifice construit par son père, composa un texte qui résume les activités du Garage des Lauerentides. Le voici en version intégrale.
F.C.M. COTTE Inc.
De père en fils depuis soixante ans
Les débuts (1920-1925)
Louis Cotte, émigrant français établi sur une ferme en Alberta, reçoit une invitation du père Dom Jean-Baptiste Morlat, curé à l’Annonciation. Celui-ci, un ami de la famille Cotte en France, réussit à convaincre Louis de venir construire et opérer un moulin à farine dans les Laurentides. Il vend donc sa ferme et tous ses biens pour venir à l’Annonciation au Québec avec sa famille. Un seul coup d’œil à ses grandes forêts impropres à la culture du blé lui suffit pour comprendre qu’il n’y a pas d’avenir dans la farine à l’Annonciation. Un certain Monsieur Labelle possède un petit garage de planches, le 1er de la région. On y vend d’ailleurs plus d’alcool ( qu’on cachait sous le plancher) qu’on y répare de voitures. Louis qui a toujours été attiré par la mécanique décide de l’acheter.
Ne laissant rien au hasard, il décide de s’inscrire à l’École Technique de Trois-Rivières pour y apprendre la mécanique. Il y restera un ans avec femme et enfants. Il travaille le jour au garage Légaré et fréquente les cours de mécanique automobile le soir. Élève doué il termine avec la note de 100 % et la médaille de bronze de l’École Technique de Trois-Rivières pour l’année 1921.
En 1922, il ouvre le petit garage de planches. Les 4 premier mois d’opérations sont encourageants pour l’époque, car ils totalisent 1 262,41 de chiffres d’affaires (vente et main d’oeuvre). Il dut cependant s’adapter aux besoins des gens de la région. En plus de la mécanique automobile, Louis devra réparer les moulins à scie des environs ainsi que les machines aratoires des cultivateurs. Voici les tarifs en vigueur en 1922:
un gallon d’essence 0,45 $
une pinte d’huile 0,35 $
réparer une crevaison 0,75 $
une livre de graisse 0,35 $
une courroie de ventilateur 0,50 $
un pneu grandeur 30 “ X 3 ½ “ 10,00 $
une chambre à air de 30 “ X 3 ½ “ 2,50 $
main-d’oeuvre à l’heure 0,75 $
En 1925 Louis Cotte prend une grande décision, il va construire un garage moderne. La méthode employée pour construire cet édifice va faire époque dans les annales de l’Annonciation. En effet Louis fait venir les blocs de ciment de Saint-Jérôme. Des blocs qui furent fait un à un dans des moules individuels. Fait nouveau à l’époque, l’entreprise Laflamme de Saint-Jérôme fournit également une devanture coulée et moulée à l’avance sur laquelle est inscrite « Garage des Laurentides ». Tous ces matériaux arrivent par le train, accompagnés d’un contremaître de Saint-Jérôme. Ce dernier reçoit 10 $ par jour, une somme impressionnante à l’époque. Au village on s’étonne: si grand et si moderne pour les quelques automobiles de l’Annonciation? Plusieurs ne se gênent pas pour murmurer: « le français est fou ». Il fallait avoir confiance en l’avenir pour construire un garage de 2500$ en 1925 au fond des Laurentides. l’avenir donnera raison à Louis.
Le Garage des Laurentides (1925-1945) :
Louis Cotte, mécanicien diplômé, se trouve donc à la tête d’un grand garage des mieux équipé. Expert en mécanique et en soudure, il pratique la mécanique au sens large. Les automobiles et les camions ne sont qu’une partie du travail. Louis dépanne fréquemment les scieries, allant même jusqu’à rebâtir les dents d’engrenage brisées; il répare des magnétos, des batteries, etc. On ne fait pas que poser des pièces neuves, bien souvent il faut les usiner sur place. Le garage fermé l’hiver puisque les voitures ne roulent plus. Il arrive cependant dans les années trente qu’il faille travailler au froid pour réparer les moteurs qu’on apporte sur des traîneaux des chantiers voisins.
Sa réputation s’étendit rapidement au-delà de la région immédiate. Son honnêteté foncière, sa maîtrise de la mécanique automobile et plus particulièrement de l’électricité, ses qualités de soudeur lui valurent très tôt d’être qualifié de « Très bon mécanicien » et on ajoutait presque invariablement « mais un peu chèrant ».
Le Garage des Laurentides sera le siège d’activités très diverses. On y vendra des automobiles de marque « Star », « Durant », « Chevrolet », « Buick » et surtout les prestigieuses « Packard ». Les gens aisés, les commerçants et les cultivateurs fortunés désirant profiter des avantages de l’électricité: Louis Cotte se lança dans l’installation et l’entretien de générateurs Delco. Il sera le premier à le faire dans les environs. En 1932, après un échec qui l’humilia un peu, Louis mettra au point la première auto-neige de la région. Cette dernière utilisait un moteur et divers composants d’un Ford T. Ses premières sorties furent des événements pour les villageois. Plus tard, ses fils pour ne pas être en reste fabriquèrent un aéroglisseur d’hiver. Le bruit infernal qu’il faisait effrayer les chevaux et lassait les gens. Louis a toujours été heureux de voir ses fils bricoler à même les outils et les pièces du garage. À la fin de son cours commercial en 1932, Pierre, l’aîné des fils de Louis Cotte, vint travailler au garage paternel. Il faut dire que la crise économique ne lui laissait pas d’autres alternatives. Son frère cadet, Frédéric, vint le rejoindre l’année suivante. Les deux frères y apprirent la mécanique sous la conduite avisée du paternel. À la morte-saison d’hiver, ils suivaient des cours de mécanique automobile à l’École Technique de Montréal. Ils assistaient aussi fréquemment à des stages de spécialisation de quelques jours. Puis vint la seconde guerre mondiale. Pierre s’engagea comme mécanicien d’entretien dans l’aviation. Frédéric, refusé au service militaire, continua de travailler au Garage des Laurentides. La santé de Louis se détériorant rapidement, Frédéric dut apprendre à s’occuper de plus en plus de la gestion du garage. À la fin de la guerre, Louis Cotte que le travail ardu de plusieurs années, l’humidité du garage, l’arthrite avait usé prématurément pris la décision de vendre son commerce. Il eut plusieurs offres d’achat. finalement il préféra vendre à ses deux fils aînés, Pierre et Frédéric.
Cotte et Frères Enrg. (1945 à 1976):
En 1945, Pierre et Frédéric achètent le garage de leur père. Ils forment une société du nom du Cotte & Frères Enrg. pour l’exploiter. Comme bien des jeunes, ils voulurent faire trop et trop vite. ils modernisèrent l’équipement, firent allonger les heures d’ouverture pour passer à 18 h par jour, engagèrent de nombreux employés, etc. Tant et si bien qu’à la fin de l’année, c’est leur père, Louis, qui dut le dépanner au plan financier. Il leur fit cette remarque: « ce n’est pas le chiffre d’affaires qui compte mes garçons, c’est le profit net ». Pierre et Frédéric ayant vu les effets nocifs sur la santé de leur père du métier de mécanicien voulurent en sortir le plus tôt possible en diversifiant leur commerce. Ils ont hésité entre une franchise pour la vente d’automobiles Chrysler et une succursale d’ U.A.P. spécialisée dans la vente de pièces de rechange pour automobiles. Monsieur Charles Préfontaine, fondateur et propriétaire de la chaîne U.A.P., fut le plus convaincant. Ils ouvrirent en 1947, l’année même du décès de leur père Louis (emporté par une crise d’angine), la première succursale d’U.A.P. l’Annonciation.
Les deux frères se partagent des responsabilités. Pierre s’occupe activement d’U.A.P. tandis que Frédéric fait fonctionner le garage. En 1951, Pierre croyant pouvoir vivre du seul commerce U.A.P. demande à Frédéric de racheter ses parts dans Cotte & Frères Enrg. Celui-ci accepte mais s’associe aussitôt à sa mère, Marie-Anne, pour consolider la situation financière de Cotte & Frères enrg. Voyant que ce commerce (U.A.P.) ne lui rapportait pas un bon revenu, Pierre accepte une offre d’emploi du siège social d’U.A.P. à Montréal. Il y travailla plusieurs années et y occupa diverses fonctions. Frédéric reprit la succursale d’U.A.P. de l’Annonciation.
Pour améliorer la rentabilité de son commerce, Frédéric y ajoute en 1951 la vente de gaz propane et de gaz à souder (oxy acétylène) ainsi que les accessoires et le matériel à soudure. C’est ainsi que Provincial Gaz enrg. s’ajoute à U.A.P. , et à Cotte & Frères enrg. Frédéric et sa mère, Marie-Anne, opèrent donc trois types de commerce différents: garage, vente de pièces de rechange et vente de gaz propane et à souder.
En 1959, Frédéric rachète la part de sa mère. Elle n’aimait plus tellement les responsabilités que lui amenait cette association. C’est d’ailleurs elle-même qui demande à Frédéric de lui racheter sa participation. Il est désormais seul à la barre.
Un beau matin de 1967, le mécanicien principal de Cotte & Frères Enrg. (employé depuis 21 ans) vient annoncer à Frédéric qu’il venait de s’engager à l’Hôpital des Laurentides. Frédéric n’hésite pas seul instant (des études préalables lui ayant fait douter de la rentabilité de cette façade de son entreprise) et décide, le midi même, de fermer les opérations de mécanique automobile. Quand son ex-mécanicien lui demandera, le même soin de surseoir à sa décision, il répondra qu’il était déjà trop tard. Il continuera cependant à vendre de l’essence jusqu’à la fin de son contrat en 1972.
F.C.M. Cotte Inc. (1976 à …):
La succursale UAP de l’Annonciation subit plusieurs changements de statut au cours de son existence. Au tout début c’était une succursale autonome rattachée directement au siège social. Puis pour une période assez brève, ce fut un satellite de la succursale U.A.P. de Mont-Laurier. Elle redevint succursale autonome pour le demeurer jusqu’en 1976, époque où elle prit le statut de magasin associé à l’organisation U.A.P.
C’est en effet en 1976 qu’un véritable coup de tonnerre éclate dans l’univers commercial de Frédéric Cotte. Alors qu’il approche de ses 60 ans, le siège social d’U.A.P. le somme de devenir propriétaire de la succursale d’U.A.P. à l’Annonciation, c’est-à-dire d’acheter la franchise, l’inventaire et les comptes recevables. En cas de refus, on le prévient qu’il sera vendu à d’autres. Une décision très difficile à prendre car ce n’est pas l’âge idéal pour prendre de tels risques financiers.
C’est donc après en avoir longuement discuté avec Claire, son épouse, que Frédéric décide de former une compagnie qui achètera la succursale U.A.P. . N’ayant pas l’argent liquide nécessaire, il dut emprunter une somme importante de la Banque Nationale et de la Caisse Populaire. Pour mieux souligner l’appui donné par Claire à ce nouveau projet, Frédéric lui offre une très grande partie des actions de la nouvelle compagnie. Enfin, pour s’assurer une possible relève il offre quelques actions à son fils Marcel. C’est ainsi qu’est né F.C.M. Cotte Inc. Par la suite André et Paul, ses deux autres fils, se joignirent tour à tour à F.C.M. Cotte Inc.
En 1978, pour se consacrer davantage aux opérations de F.C.M. Cotte Inc., Frédéric ferme Provincial Gaz Enrg. qu’il continuait à opérer en marge de son commerce principal. Cette fermeture fut l’occasion de réorganiser entièrement la structure des tâches au sein de l’entreprise. Ce qui permit, entre autres, d’engager un vendeur plein temps sur la route. Dorénavant, aidé de son épouse et des conseils de ses trois fils, Frédéric Cotte n’opère plus qu’un seul commerce (vente en gros et au détail de pièces et accessoires d’automobiles) sous la raison sociale de F.C.M. Cotte Inc.
Soixante ans déjà! :
Ça fait déjà 60 ans que Louis Cotte a ouvert son premier garage à l’Annonciation. Plus de soixante-quinze (75) employés s’y succédèrent de 1922 à 1982. Les deux premières furent Émile Contant et Philippe Legault. Sylva Therrien y travailla 21 ans comme mécanicien. Plusieurs militaires de la base Bomarc à La Macaza y travaillèrent à temps partiel en qualité de vendeur sur la route. N’oublions pas les nombreuses secrétaires qui se succédèrent depuis 1947. Claire Cotte est la dernière en liste et elle seconde admirablement bien son époux. Frédéric a d’ailleurs l’habitude de dire que c’est « sa meilleure ».
Deux générations de « fils du patron » y travaillèrent pour des périodes plus ou moins longues. En plus de Pierre et Frédéric, Louis et Jean vinrent à l’occasion y travailler. Tous les garçons de Frédéric en firent leur « job » d’été et de fin de semaine. Marcel s’est surtout occupé de la livraison du gaz propane du gaz à souder. André fit ses premières armes de vendeur au comptoir et sur la route. Paul y fit un peu de tout. Frédéric avait (et garde toujours) l’habitude de dire la vache à lait en parlant de son commerce. C’est ainsi que quand un de ses fils se plaignait de manquer d’argent, il lui répondait invariablement « la vache à lait est en bas, tu n’as qu’à aller y travailler ».
Espérons en terminant ce bref survol que F.C.M. Cotte Inc. continuera pendant longtemps de servir à la fois sa clientèle de la région et de permettre à un ou plusieurs membres de la descendance de Louis Cotte d’y trouver leur gagne-pain.
Ce texte de Frédérci Cotte a été composé pour le soixantième annivesaire du Garage des Laurentides. Il s’arrête donc en 1982. F.C.M. Cotte inc fut vendu l’année suivante à Jean Cotte, le jeune frère de Frédéric.
Le bâtiment qui abrita le garage et les commerces de Frédéric est encore debout à l’Annonciation, il abrite maitenant des bureaux gouvernementaux.